Qu’Est-ce Que le Jazz Manouche ?

Révélé par Django Reinhardt et Stéphane Grappelli, le jazz manouche est apparu dans les années 1930 en France et s’est rapidement diffusé à travers le monde.

Bien moins connu aujourd’hui, le « jazz sans tambour ni trompette » demeure toutefois une musique très appréciée des connaisseurs. Mais qu’est-ce que le jazz manouche ? Voici un article pour tout savoir sur ce style musical.

Qu’est-ce que le jazz manouche ?

L’expression « jazz manouche » est désignée comme étant l’appellation du style musical de Django Reinhardt et ses héritiers.

Pourtant, au fil du temps, différentes expressions se sont côtoyées : de « Swing gitan, à « gypsy swing » en passant par « jazz tsigane ». Cependant, chacune de ces expressions représentent plus ou moins la même musique.

De manière générale, on peut dire que le jazz manouche se caractérise par une section rythmique produite par deux guitares, une contrebasse et un violon. Ce style se démarque également par l’absence de percussions, de cuivres et de bois. D’où l’expression un « jazz sans tambour ni trompette ».

Anecdote, le saviez-vous ?

Il est important de noter que Django Reinhardt (1910-1953) présentait un handicap au niveau de sa main.

Le 26 octobre 1926, la famille Reinhardt était installée à Saint-Ouen dans des roulottes familiales.

Le plancher de la caravane de Django est recouverte de bouquets de fleurs artificielles, que sa femme n’a pas vendus au cimetière le matin.

En marchant, Django Reinhardt fait tomber une bougie et les flammes se répandent rapidement en atteignant les bouquets en celluloïds. Grièvement brûlés, Django et sa femme sont transférés à l’hôpital et deux de ses doigts, l’auriculaire et l’annulaire, resteront paralysés à vie.

Il a dû ainsi inventer une technique pour lui permettre de jouer sur le manche de la guitare. Au lieu de jouer les accords majeurs avec un septième majeur (jazz classique), il les joue alors avec une sixte majeure et une neuvième. Cela va produire des accords plus neutres, solides et enrichis.

Django transposa les accords et les gammes jazz qui se jouaient à l’époque à l’accordéon (ou bandonéon), et adapta la technique à sa main blessée à vie : ainsi commençait l’histoire du jazz manouche français.

Jazz manouche : un peu d’histoire

Implantés en France depuis plus d’un siècle, les Manouches représentent une partie de la migration des Roms dans l’Hexagone.

Cette communauté est bien connue pour sa grande autonomie culturelle, notamment dans le domaine de l’art musical. Avec l’association de la musique d’Europe centrale, celle du dancing et le jazz swing est née ainsi ce style.

Très proche du jazz classique, il a surtout été révélée par le célèbre Django Reinhardt, un des guitaristes les plus influents de son époque. Avec Stéphane Grapelli, il crée le groupe le « Quintette du Hot Club de France », qui apporte un nouveau genre de musique dans le pays.

Celui-ci remportera un franc succès à Paris et va même séduire les Américains, ces derniers le qualifiant de « French jazz ».

À la mort de Django en 1953, la relève a été assurée par les jazzmen qui l’ont côtoyé tels que la famille Ferret. Le guitariste est devenu ainsi une vraie icône à travers toute l’Europe.

D’ailleurs, les musiciens Manouches lui rendent hommage chaque année lors d’un festival de guitare jazz en Île-de-France, à Samois-sur-Seine.

Dans les années 90, le jazz manouche revient sur le devant de la scène grâce à des artistes tels que Moreno, Romane, Stochelo Rosenberg ou encore Angelo Debarre. Cependant, on peut aussi citer de nombreux artistes qui méritent aussi de figurer parmi les meilleurs guitaristes de jazz :

• Raphaël Faes,
• Biréli Lagrènne,
• Dorado Schmitt,
• Tchavolo Schmitt,
• David Reinhardt,
• Christian Escoudé,
• Sylvain Luc, etc.

Les années 2000 jusqu’à nos jours ont aussi leurs icônes : Sébastien Giniaux, Adrien Moignard, Benoît Convert, etc.

Quelles sont ses caractéristiques musicales et techniques ?

Comme dans tous les styles, le jazz manouche possède des caractéristiques qui lui sont propres. En voici alors les différentes caractéristiques.

La technique du médiator

Dans le jazz manouche, la technique de médiator utilisée est ce qu’on appelle le « jeu en butée ».

Elle est surtout utilisée lors d’une improvisation solo. Cette technique consiste à frapper la corde vers le bas et le médiator finit sa course au niveau de la corde du dessous. Il s’agit d’une technique très importante, puisque c’est la base pour maîtriser ce type de musique.

Grâce à cette technique, le musicien peut ainsi faire sonner plus fort son instrument acoustique. Il lui permet aussi de maîtriser le mouvement typique du jeu du fameux Django Reinhardt. Cette technique est contraire à la technique de l’« aller-retour » qui alterne les coups vers le bas et vers le haut, et ce, même en changeant de corde.

Par conséquent, cette technique du médiator est la base de la guitare de ce genre musical.

Vous devez ainsi la maîtriser si vous souhaitez jouer de cette musique.

Le principal avantage du mouvement réside dans le fait que comme l’attaque est orientée vers le bas, cela permet d’associer la puissance du mouvement du poignet et du poids des mains.

Le soliste peut ainsi gagner en volume et rivaliser avec certains instruments comme le violon ou les guitares d’accompagnement. Dans cette technique, même si vous avez besoin de frapper deux fois de suite la même corde, avec de l’entraînement, vous pouvez la jouer avec précision et à des tempos très élevés.

L’harmonie

L’harmonie ou les accords utilisés pour la guitare swing sont assez proches du jazz classique.

Bien évidemment, on peut entendre quelques subtilités, particulièrement sur les enrichissements des accords à trois notes.

Ces enrichissements produisent généralement le son spécifique de ce style. Dans la fameuse chanson « Minor Swing », Django se sert par exemple d’accords tels que : Am6, Dm6 et E7.

Il ajoute une quatrième note à l’accord, la sixte mineure. Pourtant, dans le jazz traditionnel, les accords utilisés seraient Am7 et Dm7.

Une autre technique spécifique du manouche provenant du génie de Django est aussi l’utilisation courante de l’arpège diminué.

Celui-ci remplace les accords de 7^e de dominante. Au-dessus de E7, les guitaristes jouent par exemple un arpège diminué 7 situé sur la tierce, quinte, septième ainsi que neuvième bémol de l’accord 7.

Grâce à cela, il est possible de faire entendre un arpège de E7b9 sans fondamentale. Il s’agit d’un arpège couramment utilisé, puisqu’on peut le jouer facilement sur le manche de manière horizontale.

La pompe manouche

La musique manouche requiert un accompagnateur pour mettre en avant le soliste. Chez les gitans, l’accompagnement à la guitare est appelé la pompe. La technique pour faire résonner la pompe manouche est de la jouer avec un air de swing.

À noter que la guitare d’accompagnement avait pour rôle de remplacer la batterie. Elle devait ainsi proposer des accents, dont ceux joués sur le charleston (deuxième et quatrième temps).

Dans l’apprentissage de ce style de jazz, l’une des premières choses que vous devez apprendre est la pompe. D’ailleurs, les gitans estiment que plusieurs années de pratique sont nécessaires avant de le faire en solo.

Il faut savoir que l’accompagnateur doit proposer un volume qui met toujours en valeur le soliste.

Le mouvement de la pompe est constitué de trois ou quatre temps avec un son plus sec et court sur le deuxième et quatrième temps. Cela permet alors d’imiter le charleston de la batterie et de produire le swing.

Styles de chanson en manouche

Ce genre se sert de plusieurs types de rythmiques.

La majorité des chansons sont des swings avec un tempo rapide où l’on utilise exclusivement la pompe en accompagnement. Cependant, Django a également créé des ballades, des boléros ou encore des valses manouches.

Les morceaux de Django figurent parmi les meilleurs morceaux de jazz manouche à la guitare :

• Django’Tiger,
• Minor Swing,
• Les Yeux Noirs,
• La Gitane,
• Billet Doux,
• Swing Gitan,
• Djangology,
• Nuages,
• Daphné,
• Hungaria,
• Bossa Dorado,
• Manoir de mes rêves,
• All of me,
• Tears,
• Blues clair.

Ecoutez par vous-même : bon courage pour jouer dessus !

Les guitares manouches

Les guitares acoustiques utilisées dans ce genre de musique sont principalement les guitares Selmer et Selmer-Maccaferri. Les luthiers se sont inspirés des guitares à cordes d’acier françaises rencontrées au début et au milieu du XXe siècle.

De la marque Selmer, on peut ainsi rencontrer trois types de guitares :

• Selmer-Maccafferri : ce modèle propose une rosace en forme de « D » et également appelée « grande gueule ». À l’origine, il s’agissait du modèle utilisé par Django. Celui-ci n’ayant plus été produit, il a été remplacé par le modèle Selmer. Même si certains luthiers ont repris sa production, il sert surtout pour la rythmique.
• Selmer : il s’agit du modèle le plus connu. Elle propose une rosace en forme de 0 (ovale), aussi appelée « petite bouche ». Cette forme de guitare permet de projeter un son plus ciblé avec une coloration médium aigue lors des solos.
• Électrique de type Selmer : À la fin des années 50, Django a utilisé le microphone ST48 des Français Yves et Jean Guen.

Côté prix, ces guitares sont chères : comptez de 1 500 € à plus de 5 000 €.

Jazz manouche : qui sont les musiciens de nos jours ?

L’art de la guitare swing s’est transmis de génération en génération et de musicien en musicien.

Malheureusement, cet univers demeure encore moins connu aux yeux du grand public et c’est un genre plutôt élitiste. Si la plupart des musiciens et des amateurs de jazz connaissent très bien Django Reinhardt, peu de gens connaissent au final les guitaristes Manouches actuels.

Pourtant, il faut dire que de nouveaux artistes se révèlent régulièrement sur la scène musicale. De nombreux musiciens qui portent haut l’étendard de cette variété de jazz. Voici donc une liste non exhaustive de grands noms dans l’univers du jazz swing d’aujourd’hui :

• France : Angelo Debarre, Biréli Lagrène, Dorado Schmitt, Tchavolo Schmitt, Romane, Benoît Convert, Sébastien Giniaux, Adrien Moignard,
• Hollande : The Rosenberg Trio, Fapy Lafertin, Lollo Meier, Jimmy Rosenberg, Paulus Schäfer,
• Allemagne : Joscho Stephan, Wawau Adler, Vano Bamberger, Gismo Graf, Janko « Stachel » Lauenberger.

En bref, voilà tout ce que vous devez savoir sur le jazz manouche. Entre son histoire, ses personnages historiques ou ses caractéristiques, vous pouvez vous baigner dans cet univers musical unique et passionnant !

Bon courage !